III. Condition de moralité et loyalisme

Le candidat doit être « de bonnes vie et mœurs » (art. 21-23 du Code civil). La vérification de cette condition donne lieu à une enquête des services de police ou de gendarmerie sur « la conduite et le loyalisme » de l’intéressé, qui peut être complétée par la consultation des organismes consulaires et sociaux (art. 36 du décret du 30 décembre 1993 modifié). Il s’agit de vérifier que l’intéressé n’a pas troublé l’ordre public et qu’il a un « comportement civique et loyal » à l’égard des institutions. L’administration peut également, pour apprécier cette condition, se référer aux condamnations figurant au bulletin n° 2 du casier judiciaire de l’intéressé (au-delà de celles qui sont mentionnées à l’article 21-27 et qui constituent par elles-mêmes un empêchement à la naturalisation).

Mais des comportements peuvent être pris en considération même s’ils n’ont pas donné lieu à une condamnation pénale. Il en va de même si la condamnation a été amnistiée ou effacée par la réhabilitation. Les condamnations pénales prononcées à l’étranger peuvent également être prises en considération : le postulant doit donc produire un extrait de casier judiciaire ou un document équivalent délivré par les autorités du ou des pays dans lesquels il a résidé au cours des dix dernières années ou, à défaut, du pays dont il a la nationalité.

Si le défaut de moralité résulte en général de l’accomplissement de faits ayant donné lieu à des sanctions pénales, en sens inverse toute infraction pénale n’est pas par elle-même constitutive d’un défaut de moralité : cela dépend de la nature de l’infraction commise (ainsi, le proxénétisme ou la tentative de corruption de fonctionnaire caractérisent le défaut de moralité, mais non par exemple un crime passionnel).

La circulaire du 27 juillet 2010 donne comme exemples de comportements susceptibles de caractériser un défaut de bonne vie et mœurs : des troubles à l’ordre public, la méconnaissance de ses obligations légales, civiles ou fiscales, un comportement violent ou dangereux, la détention d’arme non autorisée, etc.

La jurisprudence a admis que le fait de se soustraire de façon grave ou répétée à ses obligations fiscales caractérisait le défaut de loyalisme. Mais dans la pratique de simples retards dans l’acquittement de ses impôts ou des erreurs commises de bonne foi et portant sur des sommes de très faible montant peuvent déboucher sur une décision d’ajournement ou de refus. Dans sa circulaire du 21 juin 2013 (qui n’est pas en ligne), le ministre demandait pourtant, dans un souci de proportionnalité, de tenir compte de la gravité et de l’ancienneté des faits reprochés et de vérifier, en cas de manquements mineurs, isolés ou anciens, par exemple dans le paiement des impôts, s’ils relevaient d’une erreur ou d’une défaillance ponctuelles ou s’ils étaient symptomatiques d’un comportement répété justifiant le rejet de la demande.

Une instruction du 6 mai 2019 appelle à accorder une attention particulière aux propos ou actes à caractère raciste ou antisémite tenus ou commis et invite à en tenir compte comme attestant un défaut de moralité, même si la personne n’a pas fait l’objet d’une condamnation à plus de six mois de prison, qui constitue par elle-même un empêchement à la naturalisation.

Plusieurs exemples témoignent par ailleurs des difficultés rencontrées par les personnes dont le loyalisme est mis en cause sur la base de « notes blanches » des services de police et de renseignement. Le fait d’avoir conservé des liens jugés trop impliquants avec son pays d’origine, d’avoir eu des contacts avec des membres d’ambassades étrangères, a fortiori de travailler auprès des ambassades, entraîne des décisions de rejet pour suspicion de défaut de loyalisme envers la France.

Il convient enfin de souligner que même lorsque la demande a passé le cap de la recevabilité, autrement dit que la condition de « bonne vie et mœurs » a été considérée comme remplie après enquête sur « la conduite et le loyalisme du postulant », des comportements considérés comme non civiques, tel le fait d’avoir été en séjour irrégulier ou d’avoir hébergé des proches en situation irrégulière peuvent servir de fondement à un rejet de la demande en opportunité.


A. Moralité et loyalisme dans les textes

B. Condamnations et trouble à l’ordre public

C. Comportement vis-à-vis des institutions, comportement civique

D. Liens avec le pays d’origine

E. Hébergement d’un proche en situation irrégulière

[retour en haut de page]

Dernier ajout : dimanche 19 août 2012, 16:13
URL de cette page : www.gisti.org/rubrique696